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Mélenchon, "l'insoumis" qui bouscule la France

PORTRAIT
Vendredi 21 Avril 2017

​Jean-Luc Mélenchon se présente pour la deuxième fois à l'élection présidentielle. "L'homme en colère" de la gauche radicale veut toujours créer une 6ème République, s'est entièrement converti à l'écologie politique et n'a pas franchement l'air de vouloir faire plus de concessions qu'en 2012. Portrait.


Jean-Luc Mélenchon est en campagne depuis un an, avec un programme qui ne diverge pas énormément de celui de 2012. Bien que certains laissent entendre qu'il se serait "modernisé". Il faut dire que depuis l'élection de François Hollande, les victoires inattendues de formations de la gauche radicale, similaires au Parti de gauche dont il est le co-fondateur, ailleurs en Europe — en Grèce (Syriza) et en Espagne (Podemos) — sont venues regonfler le candidat de la "France insoumise". Par ailleurs, des écologistes ont rejoint son parti et l'ont repeint en vert avec des enjeux environnementaux inscrits dans le programme politique et désormais brandis comme "prioritaires" par le candidat fondateur du Parti de gauche. Jean-Luc Mélenchon croit à un changement de dogme économique et politique en Europe sous son influence et celle de formations politiques amies d'autres pays de l'Union, même si ses chances personnelles d'être élu à la présidentielle de 2017 restent faibles — selon les sondages. Surtout s'il ne s'allie pas avec le candidat et frère ennemi du PS, Benoît Hamon.

De Jean-Luc Mélenchon, on retient souvent les coups de gueule, les attaques contre les journalistes, ainsi qu'une certaine faculté à jouer au tribun "populiste", un qualificatif qu'il revendique désormais. Pourtant, le personnage est plus complexe, tout comme son parcours et son engagement sont atypiques.

Fils de pieds-noirs soixante-huitard

Jean-Luc Mélenchon est né à Tanger, au Maroc en 1951, d'une famille de pieds-noirs d'origine espagnole. Son père, né au Maroc, était contrôleur des postes, fondateur de la première station de radio de Tanger, sa mère, née en Algérie, était institutrice. A 11 ans, le jeune Mélenchon arrive en France, dans le Jura, seul avec sa mère, divorcée. Quelques années plus tard, les événements de mai 1968 sont pour lui l'occasion de s'engager comme militant de mouvements lycéens, puis au sein de la célèbre organisation étudiante UNEF (Union nationale des étudiants de France) dès 1969.

Jean-Luc Mélenchon abandonne l’idée communiste en 1977 pour rejoindre le Parti socialiste fraîchement reconstruit. Très vite, Jean-Luc Mélenchon s'engage politiquement en ralliant l'OCI (Organisation internationale communiste) dont il dirige le bureau de Besançon. Avec cette organisation politique, il participe au combat pour soutenir les ouvriers de la fameuse grève des Lip : c'est là où il consolidera ses qualités d'organisateur et d'animateur syndical, qui lui permettront par la suite de se hisser en politique. Il passe le Capes après une license en philosophie et en lettres modernes, et épouse Bernadette Abriel, une bibliothécaire. Ils ont une fille, Maryline. Si Jean-Luc Mélenchon exerce le métier de correcteur en imprimerie, puis de journaliste, avant d'enseigner le français quelques courtes années en lycée professionnel, le virus de la politique ne le lâche pas, jusqu’à en faire « profession ».

Mélenchon, "l'insoumis" qui bouscule la France
Jean-Luc Mélenchon abandonne l’idée communiste en 1977 pour rejoindre le Parti socialiste fraîchement reconstruit par le futur président de la République française : François Mitterrand. Après son installation dans l'Essonne il devient directeur de cabinet du maire PS de Massy - c'est le début de l'ascension politique de Jean-Luc Mélenchon. Devenu un membre influent de la fédération socialiste de l’Essonne, il en prend la tête en 1981, et la conservera jusqu'à son élection comme sénateur, en 1986. Jean-Luc Mélenchon : le sénateur le plus jeune de France, qui conservera son mandat jusqu'à ce qu'il soit nommé ministre par Lionel Jospin, en 2000....

Mélenchon : l'aile gauche de Mitterrand

Après l'élection de François Mitterrand, en 1981, Jean-Luc Mélenchon est un soutien inconditionnel du nouveau président, bien que représentant "l'aile gauche" du Parti socialiste de l'époque, celle qui s'oppose aux rocardiens et aux chevènementistes. C'est cette opposition à ce qu'il nomme "la gauche molle" qui l'amène à créer, en 1988, avec Julien Dray, la Gauche socialiste - un courant du PS qui s'oppose à la politique d'ouverture du deuxième mandat de François Mitterrand, prenant particulièrement à parti Michel Rocard. Jean-Luc Mélenchon veut devenir ministre. Et il le deviendra en 2000. Opposé à l'intervention militaire française lors de la première guerre du Golfe en 1991, Jean-Luc Mélenchon vote avec enthousiasme le traité de Maastricht en 1992, et défend vivement la future monnaie unique, l'euro. Un engagement qu'il regrettera et reniera 4 ans plus tard puisqu'il soumettra un amendement à la convention PS de 1996 intitulé "Tourner la page de Maastricht", complété par des déclarations affirmant qu'en fin de compte "les opposants au Traité européen avaient raison". Jean-Luc Mélenchon se présente en 1997 contre François Hollande au poste de secrétaire national du PS et échoue avec 8 % seulement des voix en sa faveur, puis refuse le poste de secrétaire d'Etat que lui propose Lionel Jospin devenu Premier ministre de Jacques Chirac. Mais Jean-Luc Mélenchon veut devenir ministre. Et il le deviendra en 2000.

De ministre du PS à l'opposant au PS



Jean-Luc Mélenchon a changé de stature en devenant ministre délégué à la formation professionnelle sous le gouvernement Jospin, entre 2000 et 2002. Une sorte de consécration politique qui le met sur le devant de la scène. Ce qui ne l'empêche pas de se refaire élire sénateur en 2004, jusqu'en 2010, et député européen en 2009 jusqu'à aujourd'hui. Le sénateur PS Mélenchon quitte alors son parti en 2008 et annonce la fondation du Parti de gauche avec le député nordiste Marc Dolez, ainsi qu'une alliance avec le Parti communiste. En réalité, Jean-Luc Mélenchon retrouve une sorte de deuxième jeunesse lors du référendum sur la constitution européenne, en 2005, comme plongé dans la lumière des projecteurs à ce moment là. Tandis qu'il s'engage dans la campagne pour le "Non", son parti, par le biais de François Hollande alors secrétaire général du PS, milite pour le "Oui". Et le "Non" l'emporte.

Naissance du Front de gauche

En 2008, alors qu'un nouveau traité équivalent à celui de 2005 a été voté par le PS à l'Assemblée nationale, Jean-Luc Mélenchon s'allie avec Benoît Hamon et Henri Emmanueli. Lors du Congrès du Parti socialiste de novembre, et après de nombreux déchirements, les trois "dissidents" proposent une motion, déclarée comme étant celle de l'aile gauche du PS. Leur motion, votée le 7 novembre arrive en quatrième position, alors que celle de Ségolène Royal emporte le vote à 80 % des suffrages exprimés.

Le sénateur PS Mélenchon quitte alors son parti et annonce la fondation du Parti de gauche avec le député nordiste Marc Dolez, ainsi qu'une alliance avec le Parti communiste dès le 18 novembre de cette même année, sous le nom de Front de gauche. Le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon, dès sa constitution, crée donc une alliance plus large nommée le Front de gauche, qui comprend au départ le seul Parti communiste français, puis des mouvements et collectifs politiques et

​Du Front de gauche à La France insoumise

 Lors de l'élection présidentielle de 2012, le Front de gauche était constitué des formations suivantes : le Parti communiste français (PCF), le Parti de gauche (PG), scission du Parti Socialiste, la Gauche Unitaire (GU), scission d’un ancien courant de la Ligue communiste révolutionnaire, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (FASE), République et Socialisme, Convergences et alternative et le Parti communiste des ouvriers de France. La dénonciation de l'oligarchie, des puissances de l'argent, d'une administration européenne aux ordres des lobbies, de traités de libre-échange "scélérats" est toujours portée par Jean-Luc Mélenchon. Crédité de 18% d'intention de vote dans les sondages quelques mois avant le premier tour, Jean-Luc Mélenchon organise des meetings géants réunissant des foules très importantes comme celui de la Bastille, le 18 mars 2012, appelant "à une insurrection civique". Le Front de gauche s'écroulera pourtant au premier tour ne remportant que 11,11% des voix exprimées. Entre les deux tours, Jean-Luc Mélenchon appelle à faire barrage à la réélection de Nicolas Sarkozy, indiquant implicitement de voter François Hollande.

Le slogan du Front de gauche de 2012 est "Prenez le pouvoir", quand le programme se nomme "L'humain d'abord". Dès lors, Jean-Luc Mélenchon va creuser le sillon de son projet de "révolution citoyenne", qu'il continue aujourd'hui de promouvoir. Depuis 2012, le candidat du Front de gauche, devenu le candidat de la France insoumise, a publié des ouvrages en lien avec ce projet. Ouvrages sur l'écologie politique (La règle verte — Pour l’écosocialisme, 2012), de philosophie politique (L'Ere du peuple, 2014), ou de critique économique (Le Hareng de Bismarck, 2014). La dénonciation de l'oligarchie, des puissances de l'argent, d'une administration européenne aux ordres des lobbies, de traités de libre-échange "scélérats" est toujours portée par Jean-Luc Mélenchon pour la campagne de 2017, mais son projet présidentiel pour cette élection est surtout marqué par des propositions d'une transformation profonde de la société et de ses institutions. Le programme de la nouvelle coalition du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon se nomme "L'avenir en commun" et propose 83 changements répartis dans 7 thématiques dont la première reste l'institution d'une 6ème République. Dans la veine de cette modernité revendiquée, le candidat de la France insoumise s'est lancé dans une chaîne youtube, très regardée, et d'un meeting où le candidat s'est dédoublé avec… un hologramme.

Jean-Luc Mélenchon, député européen et candidat de la France insoumise, continue de marteler inlassablement son projet de 6ème République, à pester contre les journalistes, à appeler à l'insurrection citoyenne, à renégocier les traités européens. Jean-Luc Mélenchon est un homme en colère et un candidat… en colère. Mais cette colère lui permettra-t-elle d'accéder au second tour ? Rien n'est moins sûr…

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