Le Tribunal correctionnel de Dakar a rendu ce mardi son verdict dans le procès opposant le chroniqueur Abdou Nguer et son co-prévenu Pape Amadou Ndiaye Diaw au ministère public.
Dans son délibéré, le juge a relaxé les deux hommes des chefs d’accusation de diffusion de fausses nouvelles et d’apologie au crime, mais a retenu contre Abdou Nguer le délit d’offense au chef de l’État.
Un verdict partiellement favorable Selon le jugement rendu ce 12 novembre, Abdou Nguer a été déclaré coupable d’offense au chef de l’État et condamné à six mois de prison, dont trois mois ferme, ainsi qu’à une amende de 200 000 francs CFA.
Une peine qu’il a d’ores et déjà purgée durant sa détention préventive, ce qui signifie qu’il sera libéré dans les prochaines heures, selon son entourage.
Son co-prévenu, Pape Amadou Ndiaye Diaw, a pour sa part été entièrement relaxé.
La défense dénonce une « déception judiciaire » À la sortie de l’audience, l’un des avocats de la défense, Me Alioune Badara Fall, a exprimé sa frustration face au verdict :
« C’est une déception. Il aurait dû être relaxé pour tous les chefs d’accusation. Le délit de diffusion de fausses nouvelles, pour lequel il avait été initialement arrêté, a été écarté, de même que l’apologie au crime. Cela prouve que sa détention était arbitraire », a-t-il déclaré à la presse.Selon la défense, cette décision illustre les incohérences de la procédure, car le principal motif d’arrestation – la diffusion de fausses nouvelles – a finalement été rejeté par le tribunal.
Un dossier emblématique des tensions entre justice et liberté d’expression L’affaire Abdou Nguer avait suscité un large débat public autour de la liberté d’expression et du traitement judiciaire des chroniqueurs et influenceurs très suivis sur les réseaux sociaux.
Le chroniqueur, connu pour ses interventions critiques, avait été interpellé il y a plusieurs mois pour des propos tenus en ligne jugés offensants envers le chef de l’État.
Sa condamnation, bien que partiellement allégée, intervient dans un contexte de crispation autour du cadre juridique régissant les infractions de presse et d’opinion.
Plusieurs organisations de défense des droits humains et de la liberté de la presse avaient, durant le procès, appelé à une révision des dispositions relatives à l’offense au chef de l’État, estimant qu’elles sont « obsolètes et contraires aux standards internationaux de la liberté d’expression ».
Une libération attendue Avec cette décision, Abdou Nguer retrouve la liberté après avoir purgé sa peine. Ses soutiens saluent une victoire partielle, tandis que ses avocats envisagent un recours pour obtenir une relaxe totale et faire jurisprudence sur le caractère liberticide du délit d’offense.
Qui est Abdou Nguer ?
Abdou Nguer est un chroniqueur sénégalais, connu pour ses interventions régulières sur Sen TV, une chaîne privée de télévision. Il s'est fait remarquer pour ses prises de position souvent critiques envers Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye. Son travail de chroniqueur lui a valu un public fidèle, mais aussi des tensions avec certaines autorités, notamment sur des sujets sensibles liés à la politique et à la gestion des affaires publiques.
Cette nouvelle inculpation s'inscrit dans un contexte plus large de tension entre certains médias et le pouvoir en place, où la liberté d'expression est parfois remise en question.