CHRONIQUE DE MOMAR SEYNI NDIAYE: Wade, Super Star ?

POLITIQUE
Jeudi 27 Juillet 2017

 
Messie héroïque ou revenant diabolique, Abdoulaye Wade a, assurément, retrouvé ses habits d'opposant des années 70, 80 et 90. Provocateur, offensif, stratège, le chef de la coalition Wattù Senegaal a réussi, en, à peine deux semaines de randonnées par monts et vaux, le tour de force d'attirer sur lui tous les feux de la rampe dans un contexte électoral si chargé. À vrai dire, il a tout simplement trusté l'actualité, en se plaçant dans l'épicentre d'une campagne, morose, insipide, et épisodiquement teintée de violence.
 
Certes, sa tentative de braver les interdits du fameux arrêté Ousmane Ngom, a fait long feu. Il n'a pu, de ce fait atteindre la Place de l'Indépendance et rallier le ministère de l'Intérieur, ce périmètre de sécurité "présidentielle", délimité sous le magistère de Wade lui-même. Mais, le quasi climat d'état de siège auquel il a contraint le ministère de l'Intérieur et la majorité, donne une image désastreusement désolante de notre vitrine démocratique. Via le Net, les vidéos de jets de grenades lacrymogènes et de pierres, de vrombissement assourdissant des véhicules de sécurité ont fait le tour du monde sous le regard interloqué des observateurs de l'OUA.
 
(adsbygoogle = window.adsbygoogle || []).push({}); Dans nombre de pays de résidence, certains de nos compatriotes sous bonne garde policière, ont relayé l'appel à manifester de l'ancien président, pour "marquer le coup", devant les consulats et autres représentations démocratiques. Qui plus est, sans coup férir, devant un impressionnant déploiement de forces de sécurité, armées jusqu'aux dents, Wade s'est sereinement, offert une forte bravade, destinée à narguer ses adversaires.
 
Un cas d'école
 
Reconduit chez lui, sous bonne escorte, il s'est pour ainsi dire, "payé" une sortie médiatique chez son ancien ministre Madické Niang, donnant ainsi encore une plus grande résonance à son message ponctué de grivoiseries et d'attaques frontales. Des flèches assassines décochées à dessein contre son adversaire, rendu aphone par l'obligation de réserve en période de campagne. Une tribune de rêve sans préjudice pour son temps d'antenne électoral.
 
Comment devant une telle succession de faits d'armes, Wade ne peut-il pas se vanter d'avoir gagné la bataille de l'opinion ? Surtout que le contexte électoral amplifie le sentiment d'avoir remporté la première manche avant même le vote de dimanche.
 
(adsbygoogle = window.adsbygoogle || []).push({}); Gênée aux entournures après une organisation chaotique du scrutin législatif, la majorité présidentielle se remet difficilement de cet imprévisible coup de boutoir du vieux chef. Elle ne réalise pas comment, un président vaincu, déchu, ses proches trainés dans la boue, tenus aux arrêts, arrive, malgré tout, à rebondir avec autant d'agilité.
 
Comment Wade que tout le monde avait voué aux gémonies, s'est-il aussi rapidement refait une santé en dépit du poids de l'âge, de son absence prolongée de la scène politique et de l'effritement de son parti ? Et surtout, au mépris de toutes les dérives qu'il a fait subir aux Sénégalais douze ans durant ?
 
Comment, cet ancien locataire du Palais de l'avenue Senghor, aux résultats économiques si faibles, chef d'orchestre d'un pillage en règle des richesses et des valeurs morales et éthiques de notre pays, a-t-il pu reconquérir le cœur de milliers de Sénégalais ? Lancinantes questions qui laissent encore pantois les ténors de la majorité, abasourdis.
 
Le retour en triomphe de Wade est un vrai cas d'école, si l'on met en parallèle son âge, ses dérives, ses parjures, ses violences avec cet impensable retour en grâce.
 
Macky, un roi esseulé
 
Alors que le Président Sall pensait avoir fait l'essentiel, en redressant les agrégats macroéconomiques de notre économie, en mettant en chantier de grands projets, en relançant une politique sociale, engagée sous Wade, voilà que le Patriarche, jette le doute dans ses esprits et dans les rangs de sa majorité. Bousculé, le Président Sall, ne peut même pas compter sur les "béquilles" de Niasse, Tanor et Djibo, engoncés dans leur rente de situation, dans Benno Bokk Yaakaar.
 
Comme un roi esseulé, Macky Sall désespère, de relancer indirectement, par une communication sur son bilan, une campagne sans relief et en même temps de se sortir de l'imbroglio électoral dans lequel l'a plongé son ministre de l'intérieur ADD.
 
(adsbygoogle = window.adsbygoogle || []).push({}); Mais les solutions proposées (saisine du conseil constitutionnel, interdiction des manifestations en plein contexte électoral) ne sont pas, pour l'heure, à la hauteur des défis, d'un Wade indémontable dans sa confortable posture de nouvel opposant, à moindre frais. En attendant peut-être que l'élection, déjà si tronquée de dimanche, lui redonne, une nouvelle opportunité de pavoiser !