"Ousmane Sonko devrait se retirer de la Primature"

POLITIQUE
Mardi 18 Novembre 2025

Lorsque le duo Diomaye–Sonko est apparu sur la scène politique sénégalaise, beaucoup y ont vu une promesse d’espérance. La loyauté, la solidarité forgée dans l’adversité et la volonté affichée de refonder les pratiques politiques ont incarné un souffle nouveau. Au lendemain du 24 mars, le Sénégal s’est reconnu dans un tandem capable d’allier conviction, réformes et sérénité institutionnelle.
Mais les tensions survenues ces derniers jours entre le président Bassirou Diomaye Faye et le Premier ministre Ousmane Sonko ont rappelé que même les alliances les plus solides sont éprouvées par la mécanique du pouvoir.

C’est dans ce contexte que l’expert électoral Ndiaga Sylla, observateur attentif des dynamiques politiques, invite à un choix difficile mais essentiel : selon lui, Ousmane Sonko gagnerait à se retirer de la Primature, tout en demeurant aux côtés de son compagnon d’armes et ami Bassirou Diomaye Faye.

Pour Ndiaga Sylla, cette proposition ne relève ni de la rupture ni du renoncement, mais d’un repositionnement stratégique. Il rappelle qu’il avait salué, dès mars 2024, la force symbolique du duo, tout en adoptant une attitude de sentinelle pour préserver le Projet. À ses yeux, la Primature est devenue un espace de tensions inévitables, car elle confère à son titulaire une exposition qui finit par brouiller la lecture de l’action gouvernementale. Premier ministre d’un président élu grâce à une dynamique collective mais également leader politique charismatique à la tête de son propre mouvement, Ousmane Sonko se trouve pris dans une double logique qui alimente les malentendus, entretient les suspicions et nourrit les interprétations contradictoires au sein de l’opinion.

Ndiaga Sylla estime qu’un retrait de la Primature aurait un double effet. Il apaiserait immédiatement les crispations visibles et offrirait au président Diomaye Faye l’espace politique nécessaire pour gouverner sereinement durant ce premier mandat. Mais il préserverait aussi l’amitié fondatrice qui a porté le Projet, amitié qui ne doit pas être sacrifiée sur l’autel des pressions conjoncturelles. En ce sens, il ne s’agirait pas pour Ousmane Sonko de s’effacer, mais de choisir une position plus compatible avec son rôle de guide politique. Ndiaga Sylla estime d’ailleurs qu’une nomination comme Ministre d’État sans portefeuille pourrait lui conférer une place à la fois respectueuse de l’équilibre institutionnel et adaptée à ses responsabilités futures.

Selon l’expert électoral, ce repositionnement exige une contrepartie claire. Bassirou Diomaye Faye devrait garantir à son compagnon un soutien politique franc, notamment en vue des prochaines échéances électorales, et veiller à ce que la cohésion du Projet ne soit pas affaiblie par les pressions extérieures. La réussite du mandat présidentiel dépendra largement de la capacité du duo à maintenir la confiance mutuelle qui a permis leur victoire. La loyauté doit rester la boussole, et le Pays doit toujours primer sur les susceptibilités individuelles.

Ndiaga Sylla insiste sur un point essentiel : les Sénégalais n’ont pas voté pour une rivalité au sommet, mais pour une gouvernance apaisée, humble et réformatrice. L’histoire politique du Sénégal est marquée par des ruptures d’amitié devenues des drames nationaux, qu’il s’agisse de Senghor et Mamadou Dia, d’Abdou Diouf et Habib Thiam, ou plus récemment d’Abdoulaye Wade et Idrissa Seck. Le duo Diomaye–Sonko ne doit pas devenir la nouvelle illustration d’une amitié sacrifiée par le pouvoir.

Pour Ndiaga Sylla, il existe des moments où la lucidité devient la forme la plus haute du courage politique. Se retirer de la Primature pour préserver l’alliance, l’amitié et l’idéal fondateur du Projet serait un geste de hauteur et non de faiblesse. C’est dans ce type de décisions que l’histoire politique distingue les hommes d’État des simples acteurs de circonstance.

Le Sénégal a besoin de stabilité, de vision et de loyauté. Il mérite une amitié politique qui survive au pouvoir et non une nouvelle fracture dont le pays sortirait affaibli. Préserver l’espérance née le 24 mars est encore possible. Cela passe par un choix fort, assumé, difficile sans doute, mais porteur d’avenir.