Vent de rébellion au sein du PDS

POLITIQUE
Jeudi 15 Aout 2019

Babacar Gaye, El Hadj Amadou Sall, Cheikh Tidiane Seck… La liste des responsables libéraux qui ont dit non au remaniement de Wade est longue. Wade qui a promu son fils et ses hommes fait déjà face à une nouvelle crise, après le récent cas Oumar Sarr.

Des «ministres» du «gouvernement virtuel» de Wade ont mal accueilli leur «nomination». Les rejets sont devenus presque viraux en l’espace de 24 heures, entre vendredi et samedi derniers. Ce sont les plus proches collaborateurs de Wade qui, sur un ton diplomatique, mais ferme, ont lancé une défiance à l’autorité. Comme l’avait fait d’ailleurs Oumar Sarr quand il s’est agi de participer ou non au lancement du dialogue national le 28 mai dernier au Palais présidentiel. Secrétaire général national adjoint, le baron de Dagana a été zappé de la nouvelle équipe et sans doute son cas a précipité la mise en place de nouvelles structures. Sur Yérim post, le désormais ex-coordonnateur national du Pds disait avant la publication de ce «gouvernement» : «Pour l’instant, personne n’est rien.

Seul Wade détient tout. Et il va décider dans la semaine de qui sera quoi. Ce qui est sûr, nous sommes tous virés pour le moment et il faut s’attendre à de grands changements.» De «grands changements» qui pourraient conduire à d’autres… grands changements puisque c’est un vent de rébellion qui guette la formation libérale avec cette vague de réprobations.

Babacar Gaye demande à Wade de le libérer de ses charges

Sur sa page Facebook, celui qui fut presqu’un éternel porte parole du Pds a tout simplement craché sur ses nouvelles fonctions. Pour «éviter que la confusion ne s’installe dans l’esprit de mes militants et sympathisants», dit-il, il informe avoir adressé une lettre à Me Abdoulaye Wade. «Par voie de presse, j’ai appris que vous avez décidé de remanier le secrétariat national du Pds. Déjà le 25 août 2016, je vous avais demandé de me décharger de mes fonctions de porte-parole et celles de secrétaire national à l’Orientation, aux stratégies, chargé des réformes ; cela, pour marquer mon désaccord à propos du fonctionnement du parti. A l’attente de plus amples informations sur les motivations d’un tel chamboulement, je vous saurais gré de bien vouloir me libérer des charges de ‘’secrétaire national, président du Comité national permanent d’organisation» que me confère votre dernière décision.

Au demeurant, je reste membre du Parti démocratique sénégalais et garde mes fonctions de secrétaire général de la fédération de Kaffrine que m’ont confiées les militants du département éponyme», a écrit Babacar Gaye au Pape du Sopi. A vrai dire, le concernant, ce n’est pas une grosse surprise parce que sur beaucoup de questions, M. Gaye ne partageait plus les décisions de son parti. Et son remplacement par Me El Hadj Amadou Sall comme porte parole du Pds présageait d’une crise de confiance entre lui et son leader.

El Hadj Amadou Sall : «Je vous remercie de pourvoir à mon remplacement»

En revanche, en voilà une grosse surprise ! El Hadj Amadou Sall, précédemment la voix du parti, a refusé de porter celle de Wade et d’assurer ses fonctions de secrétaire national chargé des Affaires juridiques du parti. Et il l’a fait savoir à l’intéressé lui-même. «Frère secrétaire général national du Pds, j’ai pris connaissance de votre décision portant réaménagement du secrétariat national du Pds. Pour des raisons personnelles, je vous remercie de pourvoir à mon remplacement du poste où vous m’avez «nommé». Restant naturellement membre du parti auquel j’ai adhéré en 1974, je vous prie de croire, frère secrétaire général national, à l’assurance de mes sentiments militants», a-t-il informé. Il se trouve, confie un autre frustré libéral, que Me Sall n’aurait pas bien apprécié que le poste de porte parole du parti, qui offre plus de visibilité à son titulaire, lui file  entre les mains et au profit de  Tafsir Thioye.

Cheikh Tidiane Seck : «Je m’attends à un choix judicieux des hommes»

C’est aussi l’autre décision inattendue. Le leader des cadres libéraux, qui concède que Me Wade reste «statutairement le patron du parti» et qu’«après sa décision on se soumet ou on se démet», n’est «pas d’accord sur cette manière de réorganiser le parti». «Je m’attends à une profonde réforme structurelle du parti réclamée par tous et à un choix judicieux des hommes qui doivent conduire aux destinées du nouveau Pds». Malheureusement, constate-t-il sur sa page Facebook, «ce maquillage qui n’est ni fictionnel ni politiquement objectif ne répond pas à mes convictions politiques et libérales». Cheikh Tidiane Seck va plus loin d’ailleurs : «Ce secrétariat national du Pds est truffé de personnes ayant soutenu, à coups de millions, la candidature du Président Macky Sall à la dernière élection présidentielle contre l’avis du parti.»

Aminata Sakho : «Je préfère rester une militante de base du Pds»

Aminata Sakho démissionne du poste que lui a confié le secrétaire général national. «Frère secrétaire général, par la présente, je viens vous faire part de ma démission au poste d’adjointe au secrétaire national chargé de l’Emploi des jeunes. Je suis au regret de vous dire que je ne suis pas en mesure de remplir les charges liées à cette fonction. Je préfère rester une militante de base du Pds pour être plus proche de mes camarades», a écrit celle qui était la présidente du mouvement «Karim Président». Dans cette nouvelle configuration, c’est Wade-fils qui est «gâté» en même temps que ses hommes comme Bara Gaye et Abdoulaye Racine Kane. C’est donc un Pds, déjà diminué pour n’avoir pas eu un candidat à la Présidentielle, qui devra résoudre cette crise interne dans les plus brefs délais. Parce qu’au fond, pour cette réforme de Wade, c’est «l’exposé des motifs» qui est en cause.

«Face aux enjeux nationaux et aux prochaines échéances électorales, tout en maintenant le comité directeur, je mets en place de nouvelles structures pour une meilleure administration et un meilleur pilotage du parti», a-t-il justifié. Et même si c’est «en attendant une réorganisation complète du parti», sa «loi» peine à passer. Quoique, rappelle-t-il, «les statuts permettent, entre deux congrès, non seulement des réaménagements, mais même la mise en place de nouvelles structures qui seront soumises au congrès».