Trois anciens ministres sous les projecteurs
Parmi les personnalités convoquées figurent Aly Ngouille Ndiaye, ancien ministre de l’Industrie et des Mines, , ex-ministre du Budget, et Amadou Bâ, ancien ministre de l’Économie et des Finances. Ces auditions visent à éclaircir les circonstances de la signature d’un protocole de paiement de 150 millions de dollars (environ 78 milliards FCFA) versés à ArcelorMittal pour solder un litige arbitral.Les juges cherchent à comprendre qui a autorisé le versement, comment les fonds ont été acheminés, et pourquoi l’Agent judiciaire de l’État (AJE) de l’époque a été écarté du processus. Le refus de ce dernier de signer le protocole est perçu comme un signal fort de dysfonctionnements institutionnels.
L’accord transactionnel, signé en 2014, a mis fin à une procédure arbitrale dans laquelle le Sénégal réclamait jusqu’à 3 300 milliards FCFA. Pourtant, les sommes versées ont été logées dans deux comptes Carpa d’un avocat français, Me François Meyer, sans passer par le Trésor public. Les avocats sénégalais initialement mandatés ont nié toute implication dans cette transaction.
La procédure a été relancée par une plainte du nouvel AJE, nommé par le président Bassirou Diomaye Faye, dans le cadre de sa politique de lutte contre l’impunité et la transparence dans la gestion des ressources publiques. Plusieurs filiales d’ArcelorMittal sont également visées, bien qu’aucun représentant n’ait encore été entendu.
Un accord à l’amiable qui suscite la controverse
La plainte déposée par l’État du Sénégal, avec constitution de partie civile, vise directement Arcelor Mittal Holdings AG (anciennement Mittal Steel Holdings AG) et cinq de ses filiales. L’enquête porte sur des faits graves : corruption, recel, blanchiment, escroquerie et complicité. Le cœur du dossier reste l’accord transactionnel controversé signé le 30 mai 2014, qui avait mis fin à une procédure arbitrale internationale.
En 2014, Arcelor Mittal s’est engagé à verser 150 millions de dollars à l’État du Sénégal, bien en deçà des 750 millions réclamés initialement. Ce règlement à l’amiable, conclu dans la discrétion, a été critiqué pour son manque de transparence. Les fonds ont été virés sur des comptes CARPA détenus par un avocat français intervenu tardivement dans le dossier, soulevant des soupçons de transactions occultes.
Un litige né d’un contrat non respecté
Le différend remonte à un contrat signé en 2007 pour l’exploitation du gisement de fer de la Falémé. En 2013, la Chambre de Commerce Internationale (CCI) avait autorisé le Sénégal à reprendre possession des mines et à les réattribuer, après avoir constaté de graves manquements de la part d’Arcelor Mittal. Le Sénégal espérait alors un investissement de 2,2 milliards de dollars, la construction d’un port minéralier et de 750 km de chemin de fer, ainsi que la création de 20 000 emplois.Selon Libération, les responsables d’Arcelor Mittal Mining Sénégal SA et d’Arcelor Mittal Infrastructures Sénégal SA restent introuvables, malgré les convocations transmises par la Division des Investigations Criminelles (DIC). Tous les comptes bancaires liés à ces entités auraient été vidés, alors qu’un contentieux fiscal portant sur 1,05 milliard de FCFA est en cours.

