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De la nécessité d’un dialogue pour sauver la Sodav

TRIBUNE LIBRE
Mardi 7 Mars 2017

Que cache le conflit entre le Conseil d’administration et le Directeur-gérant ? Quels sont les enjeux ? Et pour quelle voie de sortie de crise ?


Ngoné Ndour et Bouna Manel Fall : l'entente est toujours possible
Ngoné Ndour et Bouna Manel Fall : l'entente est toujours possible
Le samedi 11 février 2017, un communiqué du PCA de la Sodav, Mme Ngoné Ndour,  parvenu au journal EnQuête, informait l’opinion publique, en général, et la communauté culturelle, en particulier, d’une motion de défiance de 22 membres du Conseil d’administration à l’encontre du Directeur-Gérant de la Sodav, M. Bouna Manel Fall.

Il s’en est suivi un relais par la presse, d’une série de réactions tout au long de ces deux semaines. Parmi elles, celles des Acteurs de l'industrie musicale (AIM) qui dénoncent en ces termes : «Cette incompétence de la PCA est un danger à cause des risques de manipulation par les politiciens de la culture tapis dans l'ombre. En réalité ce manque de niveau est à l'origine du blocage des répartitions. Malgré le travail du DG et du personnel qui ont collecté suffisamment d'argent en 3 mois pour faire une bonne répartition» (Dakaractu du 13/2).
                                                                                                                                                                              
En transférant des compétences de services publics, c’est-à-dire, la gestion collective des droits aux pairs, l’Etat du Sénégal répond à un principe fondamental dans toute démocratie, la participation effective des communautés à la définition et à l’orientation des paramètres de leur propre devenir. Mais, faudrait-il que ce pouvoir qui est dévolu aux pairs et qui relève du service public, puisse être organisé, supervisé et contrôlé par l’Etat à travers ses divers démembrements pour que l’esprit fondamental enclin à ce transfert de pouvoirs soit sauvegardé et respecté dans toute sa plénitude.

Par ailleurs, les acteurs qui sont chargés de mettre en œuvre cette dévolution, doivent disposer de toutes les ressources intellectuelles, morales et de sens des responsabilités nécessaires pour mener à bien cette valorisante mission d’intérêt public.

Au vu des évènements dont nous venons tristement de faire l’économie à savoir les conflits entre le Directeur-Gérant et le Président du conseil d’administration de la Sodav, nous sommes au regret de constater énormément de manquements.
 
Entre autres, la volonté de traduire les relations PCA-Directeur gérant à une gestion d’épicier avec des comptes-rendus presque quotidiens, le non-respect des procédures prévues par la loi et les fondamentaux d’une gestion moderne, l’absence de devoir de réserve nécessaire à toute gestion qui se veut efficiente, le non respect de la prudence et de la mesure dans les propos, la primauté de la confrontation au détriment de l’écoute et du dialogue, etc.

Ces écarts, qui reflètent des états d’esprit déplorables devenus monnaies courantes dans notre société, nous amènent malheureusement à nous poser des questions sur la possibilité, dans un tel climat, à porter l’idéal noble que sous-entend le projet de transfert de responsabilités. C’est-à-dire en dernier ressort, «permettre l’épanouissement de la créativité et réaliser les investissements nécessaires au développement des créateurs culturels dans un environnement juridique sécurisé».
 
Ngoné Ndour : avoir une certaine  hauteur d’esprit
 
Mme Ngoné Ndour a parfaitement le potentiel comme beaucoup d’autres Sénégalaises et sénégalais pour diriger le Conseil d’administration d’une telle structure. Son expérience dans le milieu des arts et de la culture à travers, son activité professionnelle comme responsable d’une maison de production de musique, ses différentes activités de production et d’organisation de spectacles, l’autorisent objectivement à pouvoir prétendre à une telle responsabilité.
 
Cela dit, les capacités intellectuelles de même que l’expérience professionnelle dépourvues d’un certain savoir-être ne seront pas suffisantes pour aspirer à un tel niveau de fonction. En effet, le  caractère, le tempérament, le contrôle de son ego et de ses émotions sont des composantes aussi importantes que le savoir et le savoir-faire. Dans ce cas précis et pour bien d’autres situations de la vie, il est impératif, d’avoir une certaine hauteur d’esprit afin de pouvoir reconnaitre ses limites et ainsi se remettre en question et de ce fait, pouvoir s’enrichir au contact des autres.

Que dire des échos qui  nous sont parvenus ? A savoir : «Le Directeur-Gérant, par voie de son dévoué, a assigné Mme la Présidente et le Directeur intérimaire présumé, à comparaitre au tribunal du travail, le 21 Février 2017, par voie d’ordonnance de comparution datée et signée par la Présidente du tribunal, le 16/02/2017, signifiée et notifiée par Huissier de justice, accompagnée d’un Commandement de surseoir à la passation jusqu’après la comparution».                                      

En outre, «faisant fi de la décision du juge, la passation s’est faite en forcing malgré l’absence du Directeur et avec la complicité d’une agence de sécurité privée de la place, interdisant l’accès à certains ayants droits. Obstruction aussi fut faite à un auxiliaire de justice mandaté par un huissier pour faire la constatation de la brisure de la porte du bureau du Directeur-Gérant et du changement de la serrure».
Si les faits sont avérés ce serait une faute d’une extrême gravité comparé à ce qui est reproché au Directeur-Gérant. En effet, dans ce cas, c’est un défi à un pilier central d’un Etat de droit, la justice. Et cela est inacceptable.                                                                                                                           

(…) La direction d’une structure de cette nature, exige des ressources humaines avec des compétences variées (personne n’a le monopole du tout savoir), par conséquent, elle nécessite une grande capacité à pouvoir travailler en équipe avec une bonne dose de modestie  et une grande capacité d’écoute.             

Dans l’intérêt de la structure que Mme la PCA dirige actuellement, et en s’appuyant sur la grande expérience qu’elle a acquise, il serait plus judicieux qu’elle fasse un inventaire objectif de cette situation de crises et en tire toutes les conclusions. Son ultime objectif doit être de travailler exclusivement au profit de l’ensemble des ayants droits et sur des bases éthiques indiscutables, sans regarder ceux qui lui sont favorables ou non.                                                                                    

Bouna Manel Fall

Quant à Bouna Manel Fall, sa sélection après l’appel à candidature milite largement en sa faveur puisque cela suppose qu’il dispose de la légitimité et des compétences dont la Sodav a besoin pour réaliser ses objectifs.
Il a également manifesté énormément de patience depuis sa sélection en octobre 2014 jusqu’à sa prise de fonction en octobre 2016 sans percevoir de salaire. En outre, il a renoncé aux 2/3 du salaire de son prédécesseur et s’est contenté de la moitié de la dotation en carburant de ce dernier. Cette retenue, de même que ce sens de la primauté du service public sur les intérêts personnels  méritent le respect. Sans compter toute la réserve qu’il a observée depuis l’éclatement de l’affaire.

Ces dispositions manifestées autorisent par ailleurs, à se poser des questions sur les pertinences des accusations dont il fait l’objet. A-t-il utilisé les ressources de l’entreprise à des fins personnelles ? N’a-t-il pas respecté les procédures d’information et de communication ? A quel niveau se situent les dépenses engagées  et les recettes obtenues pendant son premier trimestre de gestion comparativement aux dépenses engagées et les recettes obtenues à la même période dans l’exercice précédent ?  En trois mois d’exercice comment se présente le bilan de sa gestion ? Dans quelles conditions les procédures de vote au sein du CA se sont déroulées eu égard aux textes qui régissent l’organisation ?

Voilà autant de questions que la tutelle devrait pouvoir se poser avant de donner un quitus qui va dans un sens ou dans un autre. Et qu’une mission d’un des corps de contrôle de l’État pourrait aider à éclaircir la situation, situer les responsabilités et permettre une meilleure lisibilité. Aucune personne dans un état de droit, ne doit être victime d’ignominie et d’injustice et dans cette affaire où beaucoup de zones d’ombres subsistent.
Par ailleurs, M. Fall doit savoir qu’il arrive dans un milieu très complexe de transition d’une forme d’organisation à une autre. D’où la nécessité d’un sens de l’écoute, du dialogue et de l’inclusion, peuvent être des éléments décisifs dans l’acquisition d’un climat de travail serein et apaisé, de prises de décisions effectives et de mise en œuvre d’orientations pertinentes. Il se doit alors, comme tout bon dirigeant, s’adapter aux exigences de son environnement pour atteindre les résultats qui justifient son recrutement.                                                                            

Rôle des acteurs culturels
 
Concernant les acteurs qui se sont mobilisés pour l’une ou l’autre des parties, nous leur dirons que c’est leur droit le plus absolu de veiller à leurs intérêts fondamentaux et au fonctionnement normal de leur bien commun qu’est la Sodav. Ils peuvent alors, vérifier, poser des questions, s’indigner, cela est tout à fait normal. L’exercice plein et entier de leurs responsabilités est la seule garantie pouvant leur permettre d’être des créateurs performants, de vivre de leurs différentes œuvres et enfin de se sécuriser.
Cependant, ils doivent garder à l’esprit qu’ils appartiennent tous à une même communauté, celle des acteurs culturels, agents et diffuseurs de notre patrimoine culturel national. Ils ont un devoir de retenue, d’exemplarité et de sens des responsabilités, et tout cela dans le respect des valeurs dominantes de notre société. 
                                                                                        
Le risque d’une structure provisoire
 
Dans un passé pas très ancien, l’Etat a été obligé de faire revenir sous sa tutelle des compétences qui étaient transférées. Cela s’était produit avec la lutte, le football et même sur le plan politique et administratif avec des collectivités locales qui avaient élu leurs représentants. A défaut de faire preuve de capacités de gestion avérée et de sens du consensus sur l’essentiel,  est-il certain que la nomination d’un administrateur provisoire ne saurait être exclue pour préserver l’outil ?

Par les enjeux qu’il représente, le secteur culturel a un rôle si important qu’un Etat conséquent ne pourrait laisser une partie de sa gestion aux mains de personnes incapables de faire preuve de responsabilités. Malheureusement, avec seulement trois mois de fonctionnement avec la Sodav, les fractions commencent à se dresser avec des tentatives de mise en accusation, de noyautage et de contrôle.

Vers quelles directions allons-nous ? Les acteurs culturels regorgent de suffisamment de talents et de compétences qu’ils doivent être à même de gérer leurs destinées de manière responsable.

L’année 2017 étant décrétée année de la culture au Sénégal par M. le président de la République, faisons en sorte que le climat soit apaisé et que nous nous réunissions autour de l’essentiel afin de vivifier notre plateforme culturelle pilier fondamental de toute aspiration à un développement durable.
Au demeurant, étant entendu que dans cette affaire de révocation du Directeur-gérant de la Sodav, les accusations de fautes de gestion ne sont pas réellement avérées et que la procédure de destitution est supposée ne pas respecté les principes en la matière parce que non conforme avec les statuts de la Sodav, il est possible d’ouvrir une porte a la médiation.

Après près de deux années de léthargie dans le cadre de la transition, la nouvelle Sodav a besoin d’un vrai départ et d’une réelle prise en main. Un travail très sérieux est engagé et il doit pouvoir continuer.
Un dialogue est toujours possible et toutes les possibilités doivent être ouvertes pour le nouer. Les deux principaux acteurs Mme Ndour et M. Fall ont des compétences complémentaires, donc ils peuvent et doivent faire les grandes réalisations que nous attendons d’eux et à la dimension de notre génie sénégalais.                                             

Vous n’avez pas le droit de nous décevoir. Parlez-vous et surmontez vos contradictions.
 
 Un Militant engagé de la Culture
 

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