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Il faut sauver le soldat Ouattara

TRIBUNE LIBRE
Mercredi 31 Mai 2017

C’est la succession du président Ouattara qui risque de se jouer à coups de roquettes, avec le risque de replonger incessamment le pays dans la tourmente.


Il faut sauver le soldat Ouattara
«Les mercenaires et auxiliaires sont inutiles et dangereuses : et qui tient son Etat fondé sur les troupes mercenaires n'aura jamais stabilité ni sécurité; car elles sont sans unité, ambitieuses, indisciplinées, infidèles; vaillantes avec amis; avec les ennemis, lâches; point de crainte de Dieu, point de foi avec les hommes; et l'on ne diffère la défaite qu'autant que l'on diffère l'assaut; dans la paix on est dépouillé par eux, dans la guerre par les ennemis.» Le Président Ouattara, porté au pouvoir en 2011 par des rebelles, a-t-il lu cet extrait du chapitre 12 du «Prince» de Machiavel ? On peut en douter, à en juger par le énième coup de sang orchestré par les soldats mutins en Côte-d’Ivoire. En faisant parler la poudre, une fois de plus, ces soutiers de la rébellion ivoirienne originaires du Nord, ont contraint le chef de l’Etat de la première économie de l’UEMOA à une honteuse capitulation, démontrant qu’il ne contrôle pas un rouage essentiel de son pouvoir : l’armée.
 
Pourtant, la veille seulement de cette mutinerie qui a touché la quasi-totalité des grandes villes du pays, le Président Ouattara, dans une grande opération de communication, recevait dans son palais un prétendu porte-parole des 8400 mutins, qui avait donné des assurances fermes sur les revendications portant sur le reliquat de primes promis par le président ivoirien. Ceci, après avoir déjà honoré, à coup de dizaines de milliards de FCA, une sorte de dette de sang contracté à l’égard de jeunes supplétifs nordistes.
 
Ces derniers, en capturant le président Laurent Gbagbo, lui avaient ouvert les portes du palais de Cocody lors de la sanglante bataille d’Abidjan en 2011 avec le coup de pouce décisif de l’armée française.
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de ces mutineries à répétition. Malgré l’adoption d’une loi de programmation militaire, censée rebâtir une nouvelle armée, plus que jamais, Alassane Ouattara reste tributaire des «jeunes gens» nordistes qui, lassés d’être marginalisés, ont préparé son accession au pouvoir en renversant Henri Konan Bédié un soir de Noël 1999.
 
De fortes têtes regroupées autour du sergent-chef Ibrahim Coulibaly alias «IB». Cet ancien garde du corps des enfants de Ouattara, après sa brouille avec le général Robert Guei, opérant depuis le Burkina avec la bénédiction de Blaise Compaoré, sera le principal meneur des auteurs du coup d’Etat raté de septembre 2002 qui coupera toutefois la Côte d’ivoire en deux. Avant d’être évincé par un certain Guillaume Soro, régnant sur un Nord mis en coupe réglée par des chefs de guerre. Ces fameux «Comzones», tout droits sortis d’un roman d’Ahmadou Kourouma, à l’image d’Issiaka Ouattara «Wattao», Hervé Pélican Touré «Vetcho», Chérif Ousmane «Papa Guépard», Losseini Fofana «Loss», Koné Zakaria «Djakiss» etc.
 
Après la défaite de Gbagbo à laquelle ils ont grandement contribué en faisant déferler leurs colonnes sur Abidjan, Ouattara a été obligé de récompenser ces caïds, devenus pour la plupart des milliardaires avec le trafic de diamant, d’or, de bois etc. Et certains de ces « chefs de guerre » ont été épinglés par l’Onu dans des rapports circonstanciés. Ces sous-officiers en rupture de ban, ayant presque tous accédé au grade de lieutenant-colonel, sont devenus les principaux patrons de l’armée ivoirienne en occupant les postes clefs. Un peu comme si, chez nous, Salif Sadio devenait le chef de corps du bataillon blindé ou César Atoute Badiate commandant des Forces spéciales !
 
Est-il donc étonnant de voir leurs frères d’armes de Korogho, Odienné ou Man réclamer leur part du «gâteau»  et refuser d’être les dindons d’une sinistre farce? Ironie de l’histoire, pour calmer les mutins de Bouaké, le président Ouattara, par deux fois, a été obligé de dépêcher dans l’ancienne place forte des rebelles le fameux « Wattao », dont les frasques l’avait pourtant contraint à l’exiler pendant un temps au Maroc. Démontrant, si besoin en était encore, que ni les renseignements encore moins la chaine de commandement de l’armée ivoirienne ne fonctionnent pas et que son pouvoir est tenu en joue par des condotierri.
 
Pour tous les observateurs avertis de la scène politique ivoirienne, derrière cette mutinerie, c’est la succession du président Ouattara qui risque de se jouer à coups de roquettes, avec le risque de replonger incessamment le pays dans la tourmente. Autant le président Wade avait fortement contribué à sauver Ouattara en assurant sa protection par les soldats sénégalais, lorsque sa vie était menacée par les sbires de Gbgabo, qui l’assiégeaient à l’hôtel du Golfe pendant la crise post-électorale, autant « ADO » doit s’asseoir sur son orgueil et demander à son « petit -frère» Macky Sall, sous l’égide de la CEDEAO, de lui envoyer un contingent de «Jambaar» pour reprendre en main son armée.
 
Au Mali, le chef des opérations de maintien de la paix n’a pas eu des pudeurs de gazelle, pour parler comme l’autre, en demandant que les soldats sénégalais de la MINUSMA soient l’ossature d’une force de réaction rapide déployée au centre du Mali en proie à une insurrection djihadiste. Face à des têtes brûlées qui jouent l’avenir de leur pays à la roulette russe, il n’est en rien honteux pour le chef de l’Etat ivoirien de faire appel au professionnalisme de l’une des rares armées ouest-africaines restée républicaine depuis les indépendances. Il y va de la stabilité de la sous-région car si le géant ivoirien tousse, c’est toute l’UEMOA qui risque de s'enrhumer.
 
Barka BA
Directeur de l’information de la TFM

Source : seneweb


 

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