Né au Sénégal, Mandiaye Niang se forme au droit civil, qu’il qualifie lui-même de « théorie générale des obligations », l’algèbre du droit. Pourtant, c’est dans le domaine pénal qu’il se distingue rapidement. Auditeur à la Cour de cassation, puis juge, il est propulsé au cœur d’une affaire politique majeure en 1993 : l’assassinat de Babacar Sèye, vice-président du Conseil constitutionnel.
À seulement 32 ans, il représente le parquet général dans une affaire où l’opposant Abdoulaye Wade est soupçonné d’être le commanditaire. Malgré les pressions, Niang défend une lecture rigoureuse du droit, refusant de céder à la logique politique.
De Dakar à Arusha : l’appel de la justice internationale
En 1997, il rejoint le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), à l’invitation de Laïty Kama, figure pionnière de la justice internationale sénégalaise. Affecté aux enquêtes du bureau du procureur, Niang sillonne les collines du Rwanda, collecte des témoignages, analyse les preuves. Il participe au procès d’Alfred Musema, directeur d’usine accusé de génocide, et contribue à établir une jurisprudence clé : les actes préparatoires peuvent suffire à démontrer la préméditation du génocide.Son expérience au TPIR, puis à la cour d’appel des tribunaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie, à La Haye, forge sa vision d’une justice internationale indépendante, fondée sur les faits et le droit, loin des pressions politiques.
De retour au Sénégal en 2016, Niang devient directeur des affaires criminelles et des grâces au ministère de la Justice, puis procureur général à la cour d’appel de Saint-Louis. Il incarne une magistrature sobre, exigeante, tournée vers l’intérêt général. Son élection à la CPI, avec 67 voix sur 90 États représentés, est le fruit d’un parcours sans compromis, d’une expertise reconnue, et d’un engagement constant pour la justice.
Un homme face aux défis de la CPI
À l’heure où la CPI est confrontée à des critiques croissantes — notamment après les mandats d’arrêt contre des responsables israéliens — Mandiaye Niang incarne une voix africaine crédible, expérimentée, et profondément attachée à l’indépendance judiciaire. Son parcours, marqué par la rigueur et le courage, le prépare à affronter les défis d’une institution qui doit concilier justice, diplomatie et équité.Dans un monde où les équilibres sont fragiles et les pressions nombreuses, Niang rappelle que la justice internationale ne peut être forte que si elle est libre. Et que les magistrats, pour être justes, doivent être protégés.
