
La solitude est désormais reconnue comme une urgence de santé publique mondiale. Dans un rapport publié ce mardi, la Commission de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le lien social révèle qu’une personne sur six dans le monde souffre de solitude, une condition aux effets dévastateurs sur la santé mentale, physique, sociale et économique.
Selon l’OMS, la solitude serait à l’origine de plus de 871 000 décès par an, soit environ 100 décès chaque heure. Ce phénomène, souvent invisible, affecte particulièrement les jeunes de 13 à 29 ans et les populations vivant dans des pays à faible revenu. Près d’un quart des personnes dans ces pays déclarent se sentir seules, deux fois plus que dans les pays à revenu élevé.
« Ce rapport lève le voile sur un défi majeur de notre époque. La solitude, lorsqu’elle devient chronique, affecte la santé, l’éducation et l’économie de manière profonde », a déclaré le Dr Vivek Murthy, coprésident de la Commission.
L’OMS distingue la solitude — un ressenti subjectif d’absence de lien — de l’isolement social, qui désigne une absence objective d’interactions sociales suffisantes. Les personnes âgées et les adolescents sont particulièrement à risque, tout comme les personnes en situation de handicap, les migrants, les réfugiés ou les membres de communautés marginalisées.
Les facteurs contributifs sont multiples : état de santé précaire, faibles revenus, éducation limitée, vie en solitaire, infrastructures communautaires déficientes, et usage excessif des technologies numériques, notamment les effets néfastes des interactions en ligne sur les jeunes.
La solitude augmente significativement les risques de maladies cardiovasculaires, de diabète, de déclin cognitif, de dépression, d’anxiété, et même de suicide. Elle nuit aussi à la réussite scolaire : les adolescents qui se sentent seuls ont 22 % de risques supplémentaires d’obtenir de faibles résultats scolaires. Chez les adultes, elle affecte l’employabilité et les revenus à long terme.
Sur le plan économique, les coûts liés à la solitude se chiffrent en milliards de dollars : soins de santé, perte de productivité, diminution de la cohésion sociale. À l’inverse, les communautés dotées de liens sociaux solides sont plus saines, plus sûres et plus résilientes face aux crises.
Pour répondre à cette crise silencieuse, le rapport de la Commission de l’OMS propose une feuille de route mondiale articulée autour de cinq axes :
- Politiques publiques favorisant les liens sociaux
- Recherche et collecte de données fiables
- Interventions ciblées pour les populations à risque
- Méthodes de mesure, dont la création d’un indice mondial du lien social
- Mobilisation du public pour faire évoluer les normes et créer un mouvement mondial
En replaçant le lien social au cœur des politiques de santé, d’éducation et de développement, l’OMS appelle à un engagement global pour bâtir des sociétés plus connectées, inclusives et humaines. Car face à la solitude, le remède commence par la reconnaissance… et l’action collective.