
« Du commerce, pas de l’aide »
Ce message a été répété cette semaine en Afrique de l’Ouest par Troy Fitrell, un haut responsable du département d’État. Selon lui, l’Afrique, avec ses 2,5 milliards d’habitants attendus d’ici 2050, représente un énorme potentiel économique. Pourtant, les exportations américaines vers l’Afrique sont encore très faibles, représentant moins de 1 % de leur commerce total. Washington veut donc changer de stratégie. Plutôt que de voir l’Afrique comme un continent à aider, les États-Unis veulent en faire un partenaire commercial stratégique.
Le mot d’ordre est désormais : « Du commerce, pas de l’aide ». Cela signifie plus d’exportations américaines vers l’Afrique, plus d’investissements, et des projets économiques qui bénéficient aux deux parties. Les ambassadeurs américains sont maintenant encouragés à signer des accords économiques. Et cela porte déjà ses fruits : 33 contrats ont été conclus en seulement 100 jours, pour un montant total de 6 milliards de dollars. Un sommet États-Unis–Afrique est prévu cet automne pour renforcer cette nouvelle dynamique.
L’Afrique des Grands Lacs dans le viseur américain

L’un des exemples concrets de cette nouvelle approche se trouve dans la région des Grands Lacs, notamment en République Démocratique du Congo (RDC) et au Rwanda. Alors que des discussions politiques sont en cours pour ramener la paix dans l’est de la RDC, les États-Unis avancent déjà sur le plan économique, notamment dans le domaine des minerais stratégiques comme l’étain, le tungstène, le tantale et le cobalt, très utilisés dans les téléphones, les batteries ou les technologies modernes. Le 13 mai dernier, une lettre d’intention a été signée entre une grande entreprise minière rwandaise, Trinity Metals, et des partenaires américains, pour créer une chaîne d’approvisionnement directe entre le Rwanda et les États-Unis.
Ce projet a été soutenu par la diplomatie américaine. Interrogé sur cette accélération, Troy Fitrell a été clair : « Il ne faut pas attendre des années pour agir. Les choses doivent aller vite ». Pour lui, les États-Unis agissent avec l’accord des deux pays, RDC et Rwanda, qui ont eux-mêmes demandé l’implication américaine. Le Rwanda, qui dispose déjà d’usines de transformation de minerais, est en avance dans ce partenariat.

En RDC, certains responsables commencent à s’inquiéter de cette dynamique. Ils appellent à impliquer des experts congolais qualifiés dans les discussions économiques, afin de s’assurer que les intérêts de leur pays soient bien protégés et pris en compte. Une nouvelle ère de coopération ? Ce changement de ton montre que les États-Unis ne veulent plus se limiter à donner de l’aide humanitaire, mais cherchent à construire des relations économiques solides avec l’Afrique, basées sur des investissements, des partenariats et des bénéfices partagés. Mais cette approche pose aussi des questions sur l’équilibre des intérêts et sur la capacité des pays africains à négocier des accords équitables et durables.