
La journaliste Aïssatou Diop Fall ne compte pas se laisser faire. Après avoir reçu, le 25 avril 2025, une notification du ministère de la Communication ordonnant l’arrêt immédiat de la diffusion de ses médias — Public Sn TV (YouTube), le quotidien Le Public, et le site Public.sn — elle a contre-attaqué sur le terrain juridique.
Dès le 28 avril, son conseil a déposé un recours pour excès de pouvoir devant la Cour suprême du Sénégal, contestant la légalité de l’arrêté ministériel. La plus haute juridiction administrative a jugé le recours recevable, estimant qu’il a été introduit dans les délais légaux et qu’il respecte les exigences de forme prévues par la loi organique n°2017-09 régissant la Cour suprême, modifiée en 2022.
Une décision remise en cause pour incompétence
Dans le recours, l’avocat de la journaliste, Me Abdou Dialy Kane, souligne d’abord l’incompétence du ministre à prononcer une telle interdiction. En effet, selon les articles 192 et 193 du Code de la presse, seul le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) — autorité administrative indépendante — est habilité à prendre des sanctions en matière de communication audiovisuelle. En prenant seul la décision de suspendre les médias, le ministre aurait outrepassé ses prérogatives.
Violation des libertés fondamentales
Le recours invoque également une violation des droits constitutionnels, en particulier des articles 8 et 11 de la Constitution. L’article 8 garantit la liberté d’entreprendre, et l’article 11 consacre la liberté d’expression et de presse. Or, la fermeture brutale des médias de Mme Fall serait intervenue sans motif précis ni procédure contradictoire, portant ainsi atteinte à ses droits fondamentaux.
Aucune justification claire n’est fournie dans l’arrêté, qui se contente de faire référence à l’article 178 du Code de la presse, sans expliciter les manquements reprochés à la société éditrice PROD'ADF SUARL.
Une bataille au nom de la liberté de la presse
Au-delà de la défense de ses intérêts professionnels, Aïssatou Diop Fall affirme vouloir protéger les principes démocratiques, notamment la liberté de la presse et le respect de l’État de droit. En portant cette affaire devant la Cour suprême, elle entend faire jurisprudence face à une mesure qu’elle juge arbitraire et juridiquement infondée.
Le dossier est désormais entre les mains de la juridiction suprême, qui devra trancher sur la légalité de l’acte administratif contesté. Une affaire à suivre de près, tant pour ses implications médiatiques que pour ses résonances institutionnelles.